Old soldiers never die

6 mai 1996 : une journée d’Ascension plutôt froide, grise et triste. Trois quarts d’heure avant le coucher du soleil, « La cigale », un voilier de six mètres de long, traverse le canal quand tout à coup, le capitaine passe par-dessus bord et se retrouve dans l’eau dont la température ne dépasse guère les 9° C. Les centre de secours compétents passent à l’action, et la ènième opération de sauvetage réussie en Mer du Nord, se termine aux environs de 22.00 heures par l’admission à l’Hôpital Saint-Augustin de Veurne. Mais quand vient le nom de la personne sauvée, on parle plus de l’ènième mission de sauvetage : en effet, il s’agit du Colonel André Jardon, en retraite depuis le début de cette année (1996).


Qu’est-ce qui c’était passé ? Pour le rallye annuel, un groupe de voiliers de Nieuwpoort avait traversé le canal en direction de Londres. Seul à bord de « La Cigale », André Jardon était parti vers Ramsgate un peu plus tôt dans la journée, tandis que les autres continuaient vers Londres. Le jour suivant, André retourne à Nieuwpoort mais le temps se détériore et le vent tourne : Il décide de se diriger vers Dunkerque.
Le GPS autorise de naviguer en évitant les bancs de sable mais la mer devient trop agitée pour entrer au port. Il demande de l’aide à Dunkerque et se libère de son harnais de sécurité pour aller chercher une amarre dans la cabine. En sortant, il est balayé par une vague et passe par-dessus bord. Il est 20.45 heures, heure locale. Trente minutes plus tard, le soleil se couchera. Mais ceux qui connaissent le Colonel Jardon – et qui ne le connaît pas ? – savent qu’il en faut plus pour qu’il perde son assurance et prenne peur : il est vêtu d’une combinaison de plongée, porte une Mae West et est muni d’une petite radio VHF qu’il porte sur lui dans un sac en plastique.
Cet équipement lui sauvera la vie puisqu’il parvient à alarmer les Rescue Sub Centre belge et français au sol, pendant qu’il guidera un Sea King de la Force Aérienne belge sur sa position.

A 21.18 heures, le CROSS Gris Nez (Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage) transmet l’ordre de décollage immédiat au Koksijde Rescue. Quatre minutes plus tard, l’équipage au grand complet est en route, le Cdt Avi Dekinder et le Lt Avi Rappelet (pilotes), le 1 SgtMaj Declerck (SAROO), Adj Avi Hardeman (mécanicien de bord), 1Sgt Brunet (Plongeur-Sauveteur), 1Sgt Samaey (ambulancier).
Avec sa petite radio VHF, André Jardon signe le meilleur homing de toute sa carrière : jamais aucun cours FAC ne provoqua tant d’enthousiasme et d’investissement !
Dix minutes après le coucher du soleil, l’infortuné colonel se retrouve à bord de l’hélicoptère. Lorsque Jef Dekinder prend connaissance de l’identité du naufragé, il se rappelle avoir reçu de cet officier, un Modèle C1 mais en tant que commandant de bord d’un hélicoptère SAR, il n’en tient naturellement pas compte….
Le rescapé aura passé trois quarts d’heure dans l’eau glacée et sa température corporelle a chuté jusqu’à 33°C. A 21.53 heures, le Sea King se pose à l’hôpital Saint-Augustin de Veurne où André Jardon se rétablit rapidement.
Quelques jours après son sauvetage, le Colonel Jardon a remercié le personnel de Koksijde : ses paroles chargées d’émotion témoignaient de beaucoup de gratitude et de respect.


Epilogue

« La Cigale », entretemps, avait dérivé vers la Grande-Bretagne, au large de North Foreland, où elle a été trouvée par un caboteur anglais, le « Geoman Rose Gutz ».
Le Capitaine, un nommé Putwain, est monté à bord et a rapatrié le voilier vers Queensborough d’où il a téléphoné au Cercle Nautique de la Force Aérienne à Nieuwpoort en réclamant une somme de 400.000 BEF. Le droit maritime international l’y autorisant !
Max Debaere, Cdt Avi e.r. et secrétaire du CN est parvenu à ramener cette somme à 800 livres (40.000 BEF) après maintes tractations, quelques communications téléphoniques et même quelques menaces ! La Cigale est revenue.

Old soldiers ? Peut-être, mais quoi qu’il en soit, no bold soldiers !