TAC EVAL à Bierset.

Les trois jours de guerre du 3 W Tac.

Traditionnellement, le mois de juillet entame la période annuelle des vacances d’été. Vous pourriez penser que cela s’assimile aussi à une période d’inactivité pour les militaires. Rien n’est moins vrai. Prenez par exemple, le 3e Wing Tactique à Bierset.

Du 3 au 5 juillet, il y régnait une activité inhabituelle. La base militaire était soumise à une évaluation tactique ; plus connue dans le jargon militaire sous le nom de « Tac Eval ». Pendant trois jours, l’unité était en effervescence : préparation, rendement et efficacité étaient les mots clés.


Tac Eval ?

Environ tous les dix-huit mois, nos bases de la Force Aérienne sont confrontées au « Tac Eval ». L’objectif est tester la préparation sur le plan des procédures d’alerte, de l’entretien, des opérations et de la défense de la base. Les pilotes et le personnel au sol ne sont pas seulement soumis à l’atmosphère réaliste d’une situation de crise, mais aussi à une évaluation de leurs connaissances et de leurs qualifications.

La participation régulière de chaque unité de la Force Aérienne à un tel « Tac Eval » leur confère une excellente condition et maintient le niveau de la base, de sorte qu’en temps de guerre les missions puissent être menées à bien. En outre en démontrant une telle préparation, chaque base prouve aux alliés qu’elle constitue un partenaire fiable. Ceci veut dire que l’ensemble du personnel doit faire preuve d’une collaboration et d’un engagement optimal, puisque les résultats sont communiqués à l’OTAN. Le SHAPE (Supreme Headquarters Allied Powers Europe) veut examiner dans quelle mesure les missions de guerre des unités sous son commandement peuvent être efficacement remplies.


Le « Tac Eval » diffère donc bien des autres exercices. Pendant l’évaluation tactique, on attache une énorme importance à tous les aspects de la transition du temps de paix vers une situation conflictuelle, là ou les autres exercices mettent plutôt l’accent sur un seul aspect de la guerre. De plus, le « Tac Eval » est la plupart du temps limité à une base ; il n’est peu ou pas question de coopération avec d’autres wings ou autres nations.


Des yeux de lynx

Toute l’opération se déroule sous les yeux attentifs d’une centaine d’officiers de nationalités différentes. Ils font partie de l’AAFCE (Allied Air Force Central Europe). Cette équipe d’évaluation dispose d’un scénario détaillé de la « pièce de guerre » jouée dans l’unité.

Le groupe est dirigé par un « teamChief », assisté d’un « Officier de projet ». Chaque partie du « Tac Eval » est évaluée séparément par une équipe d’experts, sous la direction d’un « area chief ». Trois parties de l’exercice sont essentielles : « l’exécution des missions de guerre », le soutien (support) et le STO (« Survival To Operate »).
Ce dernier comporte différents aspects ; la défense active et passive, les premiers soins, la défense NBC, l’évaluation de la qualité et de la quantité d’équipement et de matériel…. Pendant les exercices, le « national representative » joue un rôle essentiel puisque c’est lui qui effectue le lien entre l’équipe et l’unité évaluée.

Il veille à ce que l’équipe d’évaluation respecte les restrictions imposées par la législation belge et par l’Etat-Major de la Force Aérienne en matière de simulation de guerre.


« Tac Eval » : un dyptique.

Le Tac Eval est composé de deux phases. Le premier stade de l’exercice est la préparation (« Transition to war »). Sans avertissement préalable –dans le jargon militaire, on parle de « no notice base »- on donne l’ordre de rendre la base opérationnelle le plus rapidement possible. Les hommes sont rappelés, les avions prêts à décoller, la défense active et passive mise en place. En bref ? la base doit être préparée à une guerre imminente. Après une période maximale de douze heures, le degré de préparation est jugé par une dizaine de membres de l’équipe d’évaluation.

Lorsque l’unité est opérationnelle, on peut envisager la deuxième phase. Celle-ci a une plus grande envergure. Durant la conférence internationale AAFCE, on a fixé la date à laquelle la deuxième partie de l’exercice doit avoir lieu. La base dispose alors du temps nécessaire pour se préparer. Dès le début de la phase deux, l’unité est confrontée pendant soixante heures avec toutes les circonstances de guerre possible.


Une vue sur Bierset.

Pendant notre visite à Bierset, nous avions la possibilité de suivre quelques morceaux choisis de cette deuxième phase.
Deuxième jour du « Tac Eval », un peu après 10 Hr. Le 3 W Tac vient de réagir à une attaque chimique. La base est calme, le silence avant la tempête…. A 10 Hr 12, l’espace aérien est envahi par un bruit fracassant. Il s’agit de l’attaque de quatre F-16, jouant le rôle d’ennemi. Deux chasseurs frôlent la 8e Escadrille de Bierset, pendant que les deux autres s’occupent de la 42e. Bilan : une série de morts et blessés fictifs et une partie de l’infrastructure détruite.

Le Wing OPS est partiellement hors service, il faut trouver immédiatement une alternative. La solution : un petit bâtiment, muni d’un équipement minimum. On doit aussi subsistuer une station de contrôle souterraine à la tour de contrôle.

Lors de ce « Tac Eval », l’aspect humanitaire est également évalué. A proximité du bunker, un blessé grave gît. 


L’équipe de secours part immédiatement. Premiers diagnostics des ambulanciers : une fracture ouverte de la jambe. Les premiers soins lui sont immédiatement donnés, le blessé est mis sur un brancard et aussitôt évacué.

Un peu plus tard, une activité débordante règne près de quelques hangars. Trois Mirage de reconnaissance se dirigent vers la piste de décollage. Leur mission est claire : rechercher des troupes ennemies. Lorsque les pilotes rentrent de leur mission, ils ramènent un certain nombre de photos. Celles-ci sont immédiatement développées à la section photo mobile. Souvent ces renseignements n’ont de valeur que pour un temps limité. En moins de trente minutes, l’information acquise est interprétée ; un rapport expliquant ou confirmant les observations et les hypothèses est établi. Les Mirage chasseurs-bombardiers peuvent décoller.


Et puis le « rating ».

Pendant la première phase de l’évaluation tactique, c’est la vitesse de réaction de l’unité en temps de crise qui est prise en considération. Lors de la seconde partie, trois points importants détermineront les résultats de l’unité. Pour commencer, les « performances » (les prestations remplies pendant l’exécution des missions de guerre) sont cotées.
Ensuite, il y a l’évaluation de la maintenance du matériel. Enfin, la manière dont la base est défendue est aussi prise en considération.

Les résultats sont décernés (« rating ») en tenant compte des normes OTAN préexistantes. Chaque aspect du « Tac Eval » reçoit une des cotations suivantes « excellent », « satisfactory », ou dans des cas moins bons « marginal » ou « unsatisfactory ». Sans entrer dans les détails, on peut dire que le 3e Wing Tactique a obtenu un bon score, surtout sur le plan STO et « Performances ». Ceci signifie que les pilotes et le personnel peuvent faire face aux conditions difficiles, propres à ce genre d’exercice.
Leurs prestations sont le résultat, pour une bonne part, de leur entraînement et de leur motivation ainsi que de la bonne entente et la coopération entre les groupes et escadrilles du 3e Wing. En d’autres mots, Bierset est capable de mener sa mission en temps de guerre.