Escape and Evasion ’84.

Chaque année, dans le cadre de l’entraînement du personnel navigant, le 3 W Tac organise un exercice d’orientation et d’évasion. Cet exercice, très différent de l’entraînement dispensé à Solenzara, est essentiellement une introduction à la survie en zone de combat, pour aviateurs forcés de s’éjecter dans les lignes ennemies. Il n’a cependant pas la prétention de représenter les conditions réelles ; le climat psychologique étant pratiquement impossible à restituer en temps de paix. Profitant de l’expérience de l’USAFE et de la RAF, l’exercice a été mis au point dans la région de Spa.


Le 1er jour.

Après le repas de midi, les pilotes en tenue de vol et dotés de l’équipement réglementaire sont embarqués en bus vers la zone d’exercice. Le thème du premier jour est un parcours d’orientation en territoire ennemi. Largués par équipe de 2 sur la route Mont Rigi – Malmédy, ils doivent rejoindre le plus rapidement possible une zone de contact au moyen d’une carte « légèrement faussée ».

Chaque équipe doit transiter par un point de passage obligatoire où elle trouvera l’information nécessaire à la suite de sa progression. Celle-ci est contrée par le peloton éclaireur du 12 Li. Les pilotes sont finalement récupérés en divers points situés dans la zone boisée à l’Est de l’aérodrome de Spa. Ils seront ensuite acheminés vers un bivouac défendu par des maquisards où ils auront la possibilité de se restaurer.

Pendant ce temps, une vingtaine de sous-officiers du 3 W Tac et du 10 JBW sont dirigés vers les repaires situés dans la zone d’exercice du 2e jour. Sur chaque site d’atterrissage de campagne se trouve une équipe de contrôleurs pour veiller à la sécurité et assurer les communications radio. L’introduction d’ « étrangers » dans la région surveillée par le 12 Li a permis de tester la collaboration de la population civile. Dans cette région de la REID, le souvenir des maquisards est toujours très vivant.


Le 2e jour.

Vers 02.30 Hr, le bivouac est attaqué par un peloton du 12 Li. Aussitôt, les pilotes sont évacués vers des points de dispersion situés sur la route Francorchamps – Malmédy. Fatigués, ils doivent progresser seuls, de nuit, et avec un équipement réduit vers des points de contact où se trouvent des partisans qui les renseignent sur la suite du chemin d’évasion et sur les activités ennemies. Continuant leur progression au travers du dispositif de contre-infiltration, les pilotes rejoignent finalement une zone de récupération tenue par les maquisards. Ceux qui ne peuvent prouver leur identité sont traités comme suspects (c’est-à-dire concrètement comme prisonniers) jusqu’à la fin d’exercice.
En cours de progression, les pilotes doivent éviter la capture. Malheureusement certains évadés furent faits prisonniers et les renseignements recueillis permirent au 12 Li de resserrer sa surveillance et de localiser approximativement les zones de récupération. Les hommes du 12 Li ont même pris la combinaison d’un pilote pour déguiser un des leurs et obtenir des renseignements auprès des partisans.


Air Rescue.

Parallèlement, toute une organisation de sauvetage fut mise en place dans la zone de combat. En dehors de la zone occupée par le 12 Li, un hélistrip de campagne est établi près du monument au maquisard inconnu à LA REID. Un site complet avec véhicule radio, véhicule anti feu, ambulance est installé afin de recevoir un hélicoptère Sea King de la 40e Escadrille Héli de Koksijde. A u fur et à mesure, l’hélicoptère est envoyé vers les zones concernées où les partisans utilisent divers moyens de localisation et d’identification. Les pilotes sont récupérés soit par atterrissage sur un site discret, soit à l’aide d’un treuil. L’hélicoptère met ensuite le cap vers un lieu sûr qui marque la fin de l’exercice pour les pilotes. L’équipage ne connaît pas avec précision les différents hélistrips, seules les coordonnées des zones de récupération de plusieurs Km2.


Prisonniers.

Au cours du transfert, une surprise attend les pilotes : l’hélicoptère touché par l’artillerie ennemie doit se poser d’urgence sur un terrain tenu par le 12 Li. Les rescapés sont faits prisonniers et amenés sous bonne garde. S’il est très difficile de simuler les conditions de détention, il est en revanche possible de créer un climat psychologique très dur : fatigués, peu nourris, soumis à une menace pendant presque deux jours, plongés dans l’incertitude, soulagés d’être finalement évacués par hélicoptère, le fait de tomber à ce moment dans les mains de l’ennemi provoque le découragement indéniable qui ébranle les plus résistants. L’isolation, le bruit et la solitude continueront a préparer les pilotes à un interrogatoire mené par des spécialistes de la Gendarmerie. Le but de cet interrogatoire n’est pas de faire avouer un quelconque renseignement mais de placer chaque pilote dans des conditions aussi proches que possible de la réalité.


Quelques Anecdotes :

Au début de l’exercice, le CO de la 8e Escadrille est fait prisonnier avec quelques pilotes. Emmenés à la caserne de Spa, il profite d’un instant de distraction des sentinelles pour s’enfuir par une fenêtre. Mais, quand le Sea King ramène les pilotes à Spa, le CO est de nouveau fait prisonnier. Il s’évadera alors, pour la deuxième fois en quelques heures, de la même caserne qu’il rejoindra volontairement à la fin de l’exercice.
Une autre surprise attendait un pilote amené à l’interrogatoire : au moment où un garde lui retire sa cagoule, il découvre avec stupeur un camarade de promotion de l’ERM. Plus question dès lors d’avouer quoi que ce soit ; l’interrogatoire se limita à un grand éclat de rire et on évoqua des souvenirs de promotion.


Forces en présence.

Force amies :

  • 3 Wing Tac – Groupe de Vol
  • 40 Esc Héli
  • Dét 10 JBW

Force de contre-infiltration :

  • 3 W Tac – Esc Défense Active
  • 12 Li
  • 3 Gp Mob Gd

Force de Support :

  • Det Méd 3 W Tac
  • 250 hommes, 40 véhicules, 1 Hélicoptère.

Conclusion.

Ce genre d’exercice nécessite énormément de préparation mais profitant de l’expérience des exercices précédants et des renseignements acquis lors de stages à l’étranger, le scénario a plongé les participants des différentes unités dans des situations qui bien qu’artificielles, ont démontré qu’une bonne condition physique, de la discipline et une volonté de fer sont les éléments indispensables à la survie.

(Capt d’Avi P. MUSETTE – Wing 4e Trimestre 1984)