Caporal Aviateur Georges NOSSIN

Le Haut Commandement avait donné l’ordre de détruire les appareils et de regagner en colonne nos unités. Pour la 9e Escadrille, la guerre se termine à Lombardzijde. Une longue colonne de camions s’ébranle tel un cortège funèbre, direction : Liège.

Mais le 24 mai, les Allemands interceptent le convoi ; les camions sont réquisitionnés ; quant aux militaires, promesse nous est faite qu’aprtès l’obtention du fameux « cachet », nous pourrons regagner nos foyers étant dès lors en ordre administrativement.


Il n’en fut évidemment rien puisque pour que nous commençait un véritable calvaire. Avec mes camarades d’Escadrille, nous prenons d’un pas lourd la direction du Nord. Là, nous embarquons à bord d’une péniche avec pour ration : un pain. Après un voyage qui dura deux jours rt deux nuits, nous arrivons à Wesel en Wesphalie où nous sommes embarqués dans un train qui nous emmène dans le camp de Sandborstel près de Hambourg. Je suis envoyé dans un commando de travail, où je suis désigné pour travailler dans une boucherie, j’y resterai jusque mars 1941.

C’est alors que je reçois une lettre de mon frère qui m’annonce que je devrais être bientôt libéré.

Mes parents, d’origine flamande, vont en effet envoyer à la commission du camp des extrait d’acte de naissance attestant que leur fils est flamand. De ce fait, me voici libéré et de retour en Belgique dans mon village natal.

Le 21 avril 1941, je rentre mes effets militaires et goûte aux joies de la liberté. Pour échapper aux rafles allemandes, j’entre à l’administration communale. Mais très vite, j’entends autour de moi que certains ont rejoint l’Angleterre pour y continuer le combat.

Mon copain Jean Van Compel (1) me propose de tenter l’aventure mais j’hésite et décline finalement l’offre. Pressentiment….Jean Van Compel est arrêté, la filière d’évasion était brûlée.
Bientôt j’entre en contact avec un Chef de la résistance (2). En compagnie de deux Juifs Hollandais, nous passerons en France non occupée, le prix du passage s’élève à cinq cents francs. Arrivé à Lyon, je débarque avant la gare principale, échappant ainsi aux contrôles et me sépare des deux Hollandais qui prennent la direction de la Suisse.
De contact en contact, je vis quelques temps en France, sans ticket de ravitaillement, avec de faux papiers d’identité. A Montauban, j’ai rendez-vous avec Monsieur Charles au Lion d’Or, mais celui-ci vient d’être arrêté. Le réseau a été démantelé ; mon mot de passe n’est plus valable, le doute s’installe.

Un agent me suggère d’aller m’inscrire à l’Office des travailleurs belges où je reçois un travail. Pendant ce temps, l’organisme vérifiait les coordonnées de mon identité (l’enquète remontait jusqu’en Belgique). Au bout de huit jours, je suis averti qu’une ligne d’évasion est prête à me recevoir. Une première tentative à lieu à Cagnet-Plage où un navire Espagnol doit venir me chercher mais le mauvais temps fit qu’il ne fut jamais au rendez-vous. J’attend donc à Toulouse.

Une nouvelle possibilité s’offre à moi, à Velmania près de Bourg-Madame mais là aussi le réseau est démantelé. On est en octobre 1942, les Allemands sont dans toute la France et je n’ai plus d’alternative, il faut partir tout de suite. La seule possibilité qui reste est la traversée des Pyrénées, à pied, à partir de Puy La Roc, à destination de l’Espagne.
Après une marche épuisante, me voici arrivé en Espagne avec six autres évadés. J’arrive à Barcelone où je resterai huit jours hébergé à l’ambassade brtanique. De Barcelone, je me rends en train à Madrid, accompagné par un guide. La trversée de l’Espagne continue cette fois-ci par omnibus à destination de Balagos, ce qui prendra quatorze heures. Avec un autre fuyard, nous sommes accompagnés, à cette occasion, par deux guides qui prennent place respectivement dans le wagon qui précède et celui qui suit le nôtre, tout cela pour éviter les contrôles assez fréquents sur la ligne.

A Balagos, nous sommes pris en charge par quatre passeurs qui vont nous conduire au Portugal. Là, une légation me propose le choix entre la Grande-Bretagne, mais saturée de pilotes, ou l’Afrique du Sud, pour laquelle j’opte finalement.


De Lisbonne en passant par l’Angola, j’arrive à Léopoldville au Congo Belge ; traversée de tout le Congo pour finalement arriver à Elisabethville où je passe Noël 1942. Enfin arrivé en Afrique du Sud, je suis un entraînement d’une quarantaine d’heures sur Harvard. Mais là aussi, il y a surplus de pilotes et étant promu au grade d’Adjudant, on me propose de retourner au Congo pour devenir Chef de Peloton à la Force Terrestre. Je préfère tenter de rejoindre l’Angleterre et la Royal Air Force.

Un nouveau périple m’attend qui durera quinze jours. Je m’embarque à Capetown (Afrique du Sud) à bord d’un cargo qui me mène à Montévidéo (Uruguay) à Freetown (Libéria), Gibraltar, pour remonter finalement en convoi par l’Atlantique Nord et débarquer à Liverpool.

Là, je reçois quelques cours de reconnaissance d’avions et de bateaux ; nous sommes en novembre 1943 et, rétrogradé au rang de Sergent-pilote à la RAF, je ne suis toujours pas affecté à un squadron opérationnel. Déçu, je me porte volontaire pour passer dans le Corps des volontaires pour les missions spéciales. Il s’agit d’agents qui sont parachutés en territoire ennemi pour organiser le renseignement et le sabotage. Nous sommes quatre ou cinq à opter pour l’uniforme kaki, mais le surlendemain, nous recevons une convocation pour nous rendre à l’Etat-Major de l’Aviation, au 107 à Eaton Square.

 Là, on nous fait comprendre qu’on a besoin de pilotes pour rentrer en Belgique après la victoire. Mais je veux me battre. Je suivrai un nouvel entraînement qui débutera sur Tiger-Moth et se terminera par un OTU (Operational Training Unit) sur Spitfire. Je me porte alors volontaire pour voler sur Typhoon 1-B. Après une conversion d’une vingtaine d’heures dans le sud de la Grande-Bretagne, je débute alors dans un pool de support qui livre des Typhoon aux troups débarquées sur le vieux continent, le retour se faisant à Oxford, avion de transport et de liaison.

Fin septembre, je suis enfin affecté au 609e Squadron, équipé de Typhoon armés de roquettes au phosphre. J’y retrouve Remy Van Lierde (3) un autre pilote Belge. Ma première mission est raid sur Dunkerke et fin janvier 1945, je suis promu au grade de Pilot-Officer (Sous-Lieutenant) J’accomplirai septante-huit missions de guerre lors de mon premier et unique tour d’opération.

Après la victoire, le Capitaine Aviateur Nossin prendra le commandement de la 26e Escadrille de Chasseurs Bombardiers à Bierset du 23 août 1954 au 3 avril 1956. Il deviendra Commandant a.i de la Base du 1e octobre 1962 au 16 septembre 1963. »
Il sera retraité avec le grade de Major. 

(1) Le Commandant Aviateur J Van Compel trouvera la mort avec son équipage et tous ses passagers, en C119
      le 19 juillet1960 à Goma au Congo.)
(2) Commissaire de Police à la Ville de Liège ; Il sera fusillé)
(3) Remy Van Lierde se rendra célèbre par ses attaques contre les bombes volantes,
      il deviendra Chef de Corps à Chièvres et sera mis à la retraite avec le grade de Colonel)