Adjudant Aviateur COLLIGNON Léopold

Pilote à Bierset depuis juillet 1931 jusqu'au 1er juin 1938, date à laquelle je suis désigné pour suivre le cours de moniteur à Nivelles. Je reviendrai à Bierset le 24 septembre 1938 pour très peu de temps, car je suis muté le 6 mars 1939 comme moniteur à l'école de pilotage de Deurne, où je me trouve en 1940. L'école est envoyée à Oudja en Afrique du Nord pour continuer l'écolage. Après l'effondrement de la France, l'école est rapatriée en Belgique.


Je reste au Maroc jusqu'au moment de l'arrivée d'une commission italo-allemande qui m'expulse vers la Belgique. Resté dans le midi de la France, je rejoins le dépôt belge qui existe à Montpellier; Je falsifie ma carte d'identité, ma date de naissance 1910 devient 1900, car après 40 ans il n'y plus d'obligations militaires. Je suis alors chargé par le deuxième bureau français d'une mission d'espionnage en Belgique; j'accepte cette mission sous réserve de recevoir en échange un visa de sortie de France. Malheureusement, l'engagement ne sera jamais respecté. Qu'à cela ne tienne, je vole un cachet à la préfecture de Marseille qui sera transformé en préfecture de l'Hérault et me compose un faux visa, à l'aide de lettres d'imprimerie en caoutchouc, que les enfant utilisent.

Je traverse alors l'Espagne et le Portugal pour rejoindre Gibraltar, d'où je suis dirigé vers la Grande-Bretagne en septembre 1941.

Après avoir suivi un OTU à la RAF, je suis nommé Pilot-Officer (Sous-Lieutenant) fin 1941, et versé début 1942 au 122 Squadron, puis désigné comme Commandant de flight à la 350. Je servirai ensuite au 64 squadron pour retourner à la 350. Les missions sont multiples : attaques de trains, de bateaux, sweep, missions à 4 ou 5 avions à la recherche d'objectifs, accompagnement de bombardiers appuyés par P51 Mustang, enfin escorte de bombardiers moyens dans l'attaque des rampes de lancement de V1.
Nommé Major, je devient squadron leader à la 350 et participe au débarquement de Normandie le 6 juin 1944.

Pendant l'offensive von Rundstedt dans les Ardennes, alors que j'effectue à la tête de mon escadrille une mission dans le secteur de Slingen en Allemagne, il m'est impossible de passer sur le réservoir principal de mon Spitfire XIV qui, pour l'occasion, avait été équipé de réservoirs largables pour longs rayons d'action. Le moteur s'arrête, je passe le commandement de l'escadrille à mon second, Jean Lavigne, et prends en vol plané optimal un cap vers la Belgique, tout en essayant de remettre mon moteur en marche, mais en vain. J'entre alors dans une couche de nuages dont je sors à trois ou qautre cents mètres du sol; j'ai tout juste le temps de me poser en catastrophe dans un champ voisin.


La Belgique était libérée, mais ne connaissant pas ma position, je m'apprête à détruire mon Spit qui était irrécupérable. C'est alors que des paysans s'approchèrent, je me rendis compte en entendant parler wallon que j'était en Belgique. Arrivèrent quelques noirs américains qui m'embarquèrent sans ménagement dans un camion pour me conduire à leur C.O. Le Major trouve très étonnant que je sois belge et pense qu'il est en présence d'un allemand. Je fus donc enfermé dans une jeep bâchée sous la surveillance de deux MP armés de mitraillettes et conduit à l'Etat-Major de la 8 Air Force à Liège où un responsable belge déjà rencontré à Londres déclare me connaître.

Après avoir passé une courte nuit chez mes parents, je fus reconduit tôt le lendemain matin à Evere d'où un avion Anson me transporte en Angleterre et me dépose à Lympne où je retrouve mon escadrille moins de 24 heures après mon décollage de la veille.

Le 3 décembre 1944, la 350 est transférée en Belgique et basée à Evere. Pendant les conditions météorologiques détestables qui ont favorisé l'offensive des Ardennes, la 350 n'a pris l'air que le 18 décembre pour effectuer trois missions dans la région d'Aix-la-Chapelle. Le 24, veille de Noël, le brouillard se lève et le 350 part en mission au-dessus des Ardennes, afin d'attaquer tous les objectifs allemands qui seraient au sol. E m'installant dans mon Spit, je ne me doute pas que je vais accomplir ma dernière mission de guerre.

Avec mon ailier, je repère une batterie allemande en pleine activité, nous l'attaquons au canon et à la mitrailleuse. Je m'apprête à effectuer un deuxième passage lorsque mon moteur est touché.

Je gagne un maximum d'altitude, avec la vitesse qui me reste, et saute en parachute; l'altitude n'est malheureusement pas suffisante et je m'occasionne une double fracture à la jambe gauche sur le sol rocheux. Je suis récupéré par deux américains et un maquisard, à qui je dois expliquer que je suis un pilote de la RAF. Ils n'ont cependant pas l'air convaincu à la vue de ma tenue, un vieux pantalon défraîchi, et par-dessus mon blouson un chandail dans le même état. Je possède également un foulard sur lequel est imprimé la carte du continent, de l'argent belge, hollandais et français.

J'apprends alors que je suis tombé dans la région de Trois-Ponts et qu'il y a encore des allemands un peu partout car la ligne de combat n'est pas bien définie. Je souffre terriblement de la jambe, je reçois une sérieuse rasade de cognac avant d'être embarqué dans une jeep et dirigé vers un poste de secours. Un médecin américain arrive et commence par me fouiller. Cette opération se prolonge. J'empoigne alors le médecin par le collet en lui demandant de me soigner le plus rapidement possible.

Dirigé ensuite vers la région liégeoise, je me retrouve dans le hall d'usine qui sert d'hôpital de campagne. Là, toujours allongé sur une civière, à même le sol, je suis pris pour un boche par d'autres blessés.

La fracture ayant été réduite provisoirement, on me dirige vers la citadelle de Liège, puis transporté à Hollogne où je suis embarqué à Bierset dans un avion-ambulance DC3 le 31 décembre qui me ramènera en Angleterre. Je ne sortirai du centre de réadaptation qu'au mois d'août 1945.

J'ai accompli entre cent cinquante et deux cents missions de guerre avouées. En réalité, le nombre est certainement supérieur, car toutes n'était pas inscrites pour pouvoir rester plus longtemps en opération.


Après la guerre, promu au grade de Lieutenant-Colonel, il prendra le commandement de la Base de Bierset du 12 juillet 1957 au 1er octobre 1962.
Le 22 décembre 1958, au commande d'un Hunter 6, il choisira de rester à bord de son appareil désemparé par une panne de moteur, alors qu'il aurait pu faire usage de son siège éjectable.

Il a voulu éviter une deuxième catastrophe, semblable à celle de 1954, car s'il s'était éjecté, il est certain que le Hunter se serait écrasé sur la caserne. C'est pour cette raison qu'il choisit l'atterrissage forcé sur la vieille plaine, dans l'axe de la piste 23. Son appareil s'arrêta en équilibre au bord du ravin de chemin de fer Bierset-Hollogne, après avoir traversé la route de Grâce-Hollogne sur le ventre.

Le Lieutenant-Colonel Collignon en sortira vivant mais avec de nombreuses fractures à la colonne. De nombreuses vies humaine furent sauvées ce 22 décembre 1958 grâce au courage d'un homme. Le Lieutenant-Colonel Collignon, après sa mise à la retraite, deviendra Colonel de réserve.